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Que les magasins restent ouverts ou non, leurs vitrines continuent de s’offrir aux regards — avides ou amorphes, selon l’humeur — et, pour qu’elles vaillent le coup d’œil, certains puisent leur inspiration à des sources inattendues… Ainsi de Claudie Gastine et Stiva Doboujinsky, à qui les Galeries Lafayette ont confié la confection de leurs vitrines de Noël 1970 et qui à cette occasion se sont inspirés de la ménagerie de Grandville, ainsi que nous l’apprend Charlotte Dufour. Un autre duo, celui composé par Patrick Challande et Jean-Paul Goujon, nous fait ensuite découvrir La Prima Donna et le garçon boucher, premier roman de Burat de Gurgy, dans lequel l’érotisme le dispute au macabre dans une veine humoristique bien de cette fin de premier tiers du XDC siècle. Si ce récit est aujourd’hui bien oublié, il peut se targuer d’avoir retenu l’attention de figures aussi prestigieuses que Balzac et Baudelaire… Après un temps d’arrêt sur une lecture méconnue d’un poète qui a eu maille à partir avec la justice, ce numéro convie — admirez l’esprit de suite… — son lecteur à prêter l’oreille à certaines velléités insolites issues de la basoche. Remettant en question cette idée reçue qui domicilie les versificateurs dans une tour d’ivoire, Paul Aron nous emmène sur les bancs des tribunaux pour y goûter la poésie des prétoires, plaidant – en prose pour celles et ceux qui auraient eu la malice de se poser la question… — pour une découverte de cette poésie judiciaire. Au rayon de la poésie transplantée dans des univers inattendus, Patrick Besnier se penche pour sa part sur l’entreprise cinématographique initiée par l’acteur Charles Le Bargy, ami d’Edmond Rostand. L’auteur de Cyrano a collaboré à l’entreprise de son ami à travers un poème (en alexandrins, s’il vous plaît !) intitulé le Bois sacré, porté à l’écran dans un film aujourd’hui perdu. On peut cependant se l’imaginer à travers les témoignages qui demeurent au sujet de cette adaptation.Le poète ne semble pas avoir accordé une attention considérable à cette tentative, alors même que son intérêt pour le cinéma était indéniable. Dans le monde littéraire comme en d’autres, certaines amitiés sont plus ou moins distraites. D’autres sont lourdes à porter. Philippe Chauvelot nous en convainc en examinant la relation particulière de Marcel Rouff et Maurice Sailland, mieux connu sous le nom de Curnonsky, telle qu’elle prend forme non seulement dans leurs échanges épistolaires, mais aussi et surtout dans le roman à clé du second, Guinoiseau, qui fait du premier son principal protagoniste. Cela ne va pas sans un certain dépit de ce dernier, dont témoigne l’exemplaire de l’ouvrage annoté de commentaires… pour le moins peu amènes s’agissant du portrait que son camarade de lettres a proposé de lui. Investissant à son tour la chronique relative aux figures d’éditeurs créée par Jean-Yves Mollier, et qu’il tenait à cœur à la rédaction d’Histoires littéraires de développer, Olivier Bessard-Banquy propose à son tour le portrait d’un homme du livre. Dans un texte nuancé et très informé, il retrace le parcours de Paul Otchakovsky- Laurens, de ses débuts aux dernières années à la barre de la maison d’édition à ses initiales. Jean-Paul Goujon, aidé de son acolyte Eric Walbecq, buissonne comme à son habitude dans les catalogues de vente, en distribuant à l’occasion les horions qui font la joie des nombreux fidèles de sa chronique (nous en connaissons qui ne manquent jamais de commencer la lecture d’Histoires littéraires par cette rubrique). Quels prix atteindraient certains des livres d’artistes (ils se comptent par centaines…) réalisés par Michel Butor s’ils étaient aujourd’hui mis en vente ? Le fait est qu’un lieu dédié à leur conservation et à leur mise en valeur en a soustrait une part conséquente aux lois (souvent savamment dérégulées) du marché. C’est à sa directrice, Aurélie Lamelle, qu’il revient de nous présenter L’Archipel Butor, lieu unique en son genre, sis en la localité de Lucinges, où Michel Butor s’était installé, et qui non seulement possède un extraordinaire fonds de livres d’artistes, mais se veut aussi un lieu dédié à l’exposition des créations en ce domaine. S’agissant d’expositions toujours, confinement oblige, les visites restent toujours rares. Cette fois-ci, plutôt que de nous tourner vers des expositions en ligne comme il a pu nous arriver de le faire au cours des derniers mois, nous avons puisé dans les comptes rendus d’anciennes expositions publiés en ligne dans L’Exporateur littéraire : vous y découvrirez la collection de Jérôme et Irène Lindon à la BNF, Hauteville House, la fameuse maison d’exil de Victor Hugo et les cahiers de notes présentés par la Fondation Bodmer à Genève. Les considérations qu’Olivier Barrot nous propose au sujet d’un livre peu connu de Modiano sont-elles issues de notes de lecture ? Nous l’ignorons. Peut-être nous en dira-t-il davantage dans une prochaine livraison de la chronique, « Lecture, lectures » que son texte inaugure. Enfin, histoire d’achever ce parcours sur une note pimentée, nous publions — cela faisait longtemps… – la missive mécontente d’un autre fidèle lecteur d’Histoires littéraires, l’homme de radio belge Marc Danval, qui avait à nous faire part de son désappointement de voir la place faite dans un précédent numéro à son compatriote Maurice Carême. La littérature est faite d’inclinations, de passions parfois. Elle a aussi son lot de réticences…

Sommaire Histoires littéraires n°84