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La petite troupe qui s’était lancée dans la mêlée éditoriale au tournant du nouveau millénaire ne manquait pas d’audace : sans attache institutionnelle, sans appui des maisons d’édition classiques, avec en outre l’étrange projet de réunir les dilettantes et les universitaires autour de cet objet donné pour mort, l’histoire littéraire. Pas n’importe laquelle cependant : celle des XIXe et XXe siècles en littérature française. Et, l’époque étant de tous les combats pluriels, pour bien marquer notre modernité quand même, il s’agirait d’histoires littéraires, avec des « s » tout à fait programmatiques. La petite histoire retiendra peut-être ce moment comme elle semble vouloir retenir l’événement qui avait été à l’origine de cette aventure : le premier Colloque des Invalides, qui serait à son tour suivi de dix-neuf autres « colloques des cinq minutes ». La petite troupe créatrice de la nouvelle revue se réduisait à trois personnes : Jean-Jacques Lefrère, Jean-Didier Wagneur et Michel Pierssens. Mais elle pouvait s’appuyer sur le vaste et inventif bataillon de ceux qui avaient participé au colloque, en conférenciers ou en spectateurs, tous bien décidés à faire assaut d’érudition extravagante, tout en s’amusant beaucoup – deux principes fondamentaux qui n’ont jamais faibli.

Jean-Jacques Lefrère, Michel Pierssens et  Jean-Didier Wagneur, fondateurs d’Histoires littéraires.

 

Avec l’énorme énergie qu’on lui connaissait, Jean-Jacques Lefrère organisa un véritable atelier domestique, géré par Kathryn son épouse, qui nous permit de monter une opération éditoriale très offensive. Jean-Jacques connaissait à fond le milieu des collectionneurs et bibliophiles et moi celui des chercheurs plus classiquement universitaires, ce qui ouvrait des perspectives fécondes en matière d’abonnements. Tout fut mis en place très vite, y compris l’organisation des sommaires et la réalisation matérielle de la revue, confiée dès le départ aux Éditions du Lérot, toujours fidèles vingt ans plus tard. Contre la vogue des formats standardisés sur papier glacé, notre choix fut celui d’un clin d’œil aux revues des hautes époques qui nous inspiraient : beau papier, typographie soignée, pages à couper soi-même. Et même, dans les moments les plus fastes, des suppléments devenus des raretés bibliophiliques. Passionnée du XIXe et du XXe siècle, HL n’a pas cessé de s’intéresser à l’actualité de ces grands siècles, en particulier par des recensions nombreuses et sans concession. Au fil des années, beaucoup de jeunes talents vinrent à la rescousse pour poursuivre à leur tour, le moment venu, d’autres aventures, Muriel Louâpre au premier chef. De la main d’œuvre, il en faut pour publier une revue trimestrielle de qualité, soigneusement éditée, aussi parfaitement corrigée que possible. Sans oublier une présence très affirmée sur Internet, grâce au talent d’Éric Nicolas et une veille éditoriale toujours efficace, grâce à Philippe Didion.

Ayant traversé sans encombre ses vingt premières années, et malgré la perte immense que fut la disparition de Jean-Jacques Lefrère, la revue continue et elle se renouvelle, grâce à l’implication de Jean-Paul Goujon dans la rédaction, lui qui avait été parmi les premiers compagnons de route et demeure le chroniqueur redouté des ventes aux enchères. Mais c’est aussi toute une jeune génération formidablement inventive qui nous a rejoints : David Martens, Bérengère Levet, Romain Enriquez et Emilien Sermier. Ainsi Histoires Littéraires va-t-elle devenir encore plus plurielle qu’à ses débuts. Désormais, ce sont toutes les littératures de langue française qui trouveront un écho dans nos pages ainsi que le XXIe siècle : cela s’imposait puisque nous avons le même âge.

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À tout âge, cependant, les revues ont besoin d’aliment matériel. Toute la rédaction travaille bénévolement à produire HL mais tout ne peut pas se faire gratuitement : aussi bien les transcriptions de nos grands entretiens que la maintenance de notre site web sont des activités à haute valeur ajoutée qui méritent compensation.
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MP