Après la livraison consacrée aux suppléments littéraires, il fallait donner au public un numéro plein d’esprit ; n’ayant pas l’article, les tenanciers se sont tournés vers Montmartre, guidés en cela par de savants calculs : pile entre le cent-cinquantenaire de la naissance d’Allais (1854) et le centenaire de sa mort (1905), l’occasion était bonne d’emprunter au maître du concombre fugitif un peu de sa cocasserie. On lui rend en échange un hommage nourri, entre autres, de documents inédits. Nos abonnés exclusivement rencontreront Trente accusés d’un procès fameux, dont certain anarchiste du ministère de la Guerre… Tous documents que nous croyons authentiques et éclairants, n’en déplaise à Léon Bloy pour qui « il n’y a de vrai que ce qu’on invente ». Cette devise paradoxale pour une revue historique a l’avantage de rappeler que l’œuvre est ouverte et que le critique doit passer par la fenêtre et non la décrire. Ainsi du théâtre : le portrait d’acteur (Mounet-Sully) est un grimoire très suffisant où lire les mutations du théâtre d’un siècle à l’autre, et ce qui se passe sur scène procède autant des corps qui jouent que des corps qui regardent, comme le rappelle Anne Ubersfeld. On lui empruntera encore cette satisfaisante idée que l’art ne se limite pas au génie qui arrive et casse tout le reste : l’art, c’est nous tous. Ménageons jusqu’à la susceptibilité des météores.

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