Depuis ses débuts, Histoires littéraires ambitionne d’apporter des perspectives et des connaissances nouvelles sur une littérature moderne dont on croit tout savoir. Le présent numéro fait la démonstration que l’ingéniosité de lecteurs érudits peut conduire à la création d’outils inconnus. Edouard Graham le manifeste avec brio en montrant en détail ce que peut révéler la pratique de l’envoi aux confrères de la part d’écrivains dont l’identité d’auteur se construit de manière décisive par l’élaboration d’un réseau de solidarités utiles. Une Marie Krysinska a tout tenté pour y parvenir – sans y réussir vraiment –, et Seth Whidden explore ce qui peut se lire là où un envoi à Mirbeau révèle une tentative d’occultation du dédicataire. Par les pleins comme par les creux, l’histoire littéraire découvre ainsi de nouveaux horizons.
Cocteau s’était fait une vocation d’éblouir ou d’étonner : Henri Scepi, en analysant le dossier de sa réception journalistique, montre à son tour ce qu’il y a à apprendre des manipulations réciproques, toujours retorses, des auteurs et de leurs commentateurs plus ou moins bienveillants. Jean-Yves Mollier connaît ces arcanes mieux que personne : dans l’entretien qu’il nous a accordé, il dévoile quelques-uns des secrets qui éclairent son itinéraire et ont fait de lui un novateur radical grâce à qui le XIXe siècle a changé de visage. Hubert Nyssen s’en est chargé du côté de l’édition pour le XXe : en visitant ses archives, c’est là aussi un créateur que nous saluons.
L’histoire littéraire est décidément une jeunesse qui a l’avenir pour elle.