L’été est là, propice pour retrouver de vieux amis que les vicissitudes de la vie quotidienne ne permettent pas toujours de fréquenter autant qu’on le souhaiterait durant d’autres périodes de l’année. Aussi, pour cette livraison estivale, Histoires littéraires se place sous le signe de l’amitié (et, il est vrai, des inimitiés également). Le début du numéro s’ouvre sur la deuxième partie de l’étude richement documentée de Christian Soulignac sur l’amitié entre Jehan- Rictus, Rachilde et Jeanne Landre, que nous avions commencé à publier dans notre précédent numéro. Dans la foulée, et comme pour assurer un certain équilibre dans la balance des affections et crispations entre gens de lettres, Jean- Paul Goujon examine les publications disons quelque peu coléreuses d’André Germain au sujet de Sodome et Gomorrhe et de son auteur, Marcel Proust, coupable, entre autres motifs de griefs, d’avoir évoqué un sujet aussi irritant pour Germain que l’homosexualité. Rassemblée par Pauline Flepp et David Martens, l’« Anthologie documentaire » qui constitue désormais, depuis plusieurs années, un mode d’exploration unique de questions et de formes d’écriture insolites au sein d’Histoires littéraires, est cette fois dédiée aux agendas d’écrivains… Ces lieux de notation des mille et unes obligations du fil des jours, notamment des rendez- vous, avec les amis ou les moins amis, revêt toutefois bien d’autres fonctions, chacun et chacune usant de façon idiosyncrasique de ces petits volumes, qu’il s’agisse d’en faire une sorte de journal ou encore d’y noter des amorces d’œuvres au gré des moments d’inspiration. En matière de vie éditoriale, Gérard Minaud & Stéphanie Parmentier poursuivent ensuite leur étude, entamée dans le précédent numéro, du rôle qu’a joué Clément Pastorelly comme éditeur de Marcel Pagnol. Du côté d’Olivier Barrot, il s’agit cette fois d’évoquer la figure de Charles Vildrac, écrivain certes un peu oublié, mais dont l’auteur de cette chronique rappelle la notoriété et la place singulière qu’il a pu occuper de son vivant. Poursuivant son exploration de la littérature relative aux spectacles visuels, Patrick Désile se penche cette fois-ci sur les nouvelles formes prises, durant les années 1880, par les panoramas, dispositifs d’images dont l’ampleur permettait une contemplation collective… et invitait par conséquent à s’y rendre avec ses amis. La chronique des ventes de Jean-Paul Goujon se révèle quant à elle toujours aussi tonique qu’à l’accoutumée, avec qui plus est quelques belles trouvailles signées de Barbey d’Aurevilly, Fénéon, Mallarmé ou encore Valéry. S’il est bien un genre propice à l’entretien de l’amitié, c’est, justement, celui de l’entretien. Dans le cadre de nos « Contrepoints contemporains », celui que Cécile Wajsbrot accorde à Florence Krésine permet de prendre la mesure de la relation de l’autrice avec l’histoire littéraire, bien au-delà de la seule littérature de langue française au demeurant, et notamment de son rapport aux écrits de certaines autrices telles que Virginia Woolf. Avant que les habituelles recensions ne clôturent cet ensemble, suit un entretien de David Gullentops avec Emilien Sermier au sujet de la multiplicité des formes d’expression – littérature, dessin, ballet, cinéma… – pratiquées par ce touche-à-tout et cet ami de toutes les formes médiatiques que fut Jean Cocteau.